Documentation Documentation utile Loi insérant la médiation de dettes amiable dans le livre XIX du Code de droit économique (3 mai 2024)

Loi insérant la médiation de dettes amiable dans le livre XIX du Code de droit économique (3 mai 2024)

Mis à jour le 30/09/2024 — Année du contenu : 2024

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Le livre XIX du Code de Droit Economique (CDE) contient désormais un nouveau titre 3 consacré à la médiation de dettes amiable 1https://www.ejustice.just.fgov.be/eli/loi/2024/05/03/2024005080/justel , désormais consacrée dans la loi. Celui-ci est applicable à toutes les demandes de médiation faites à partir du 10 juin 2024.

L’avis du Centre d’Appui : si cette loi contribuera sans doute à légitimer un peu plus l’existence et l’intervention des services de médiation de dettes amiable, elle ne sera pas de nature à révolutionner la pratique des médiateurs amiables. Par exemple, l’obligation de signer une convention existe déjà en Flandre et en Wallonie. Quant au « moratoire » des poursuites vis-à-vis du débiteur, cette suspension des poursuites est trop limitée dans le temps et ne constituera probablement pas une solution satisfaisante pour les débiteurs structurellement endettés.

Définition et objectifs de la médiation de dettes amiable2Art. XIX.16 à XIX.19

Par médiation amiable, la loi vise toute « prestation de services, à l’exclusion de la conclusion d’un contrat de crédit visé à l’article I.9, 39°, en vue de venir en aide de manière préventive et/ou curative à tout débiteur qui rencontre des difficultés financières ou est dans l’impossibilité de faire face à ses dettes exigibles ou à échoir ». L’objectif de la médiation amiable est « de trouver une solution durable aux difficultés financières et/ou aux problèmes de surendettement du débiteur » et « vise à l’aider à respecter ses engagements envers ses créanciers dans la mesure où cela lui permet, ainsi que sa famille, de maintenir des conditions de vie conformes à la dignité humaine ». Elle ne peut être entamée qu’à la demande du débiteur.

Cette loi s’applique à toute médiation de dettes amiable d’un débiteur physique, y compris les consommateurs au sens du CDE.

Rôle et obligations du médiateur de dettes amiable3Art. XIX.20 à XIX.24

La loi énumère de façon limitative les personnes pouvant exercer le rôle de médiateur de dettes amiable ainsi que les conditions qu’elles doivent remplir. Elle rappelle également que, bien qu’agissant sur demande du débiteur, le médiateur est un intermédiaire entre le débiteur et ses créanciers et doit remplir son rôle avec toute la diligence requise.

Le médiateur a l’obligation de divulguer tout conflit d’intérêt envers le débiteur avant d’entamer ou de poursuivre la médiation. Dans pareille situation, il ne pourra accepter ou poursuivre la médiation qu’à condition que lui-même et le débiteur déclarent expressément que ce conflit d’intérêt ne compromet pas son indépendance. Cette obligation est applicable durant toute la durée de la médiation.

La loi insiste également sur le secret professionnel auquel le médiateur amiable est tenu. Il ne peut ni partager avec des tiers les informations qu’il reçoit dans le cadre de sa mission, ni partager avec les créanciers des informations qui ne seraient pas strictement nécessaire à l’exercice de sa mission. Dans ce cas, il doit d’abord récolter l’accord du débiteur.

Pour récolter les informations relatives aux dettes du débiteur nécessaires au traitement et au suivi de la médiation de dettes, le médiateur peut, avec l’accord du débiteur, contacter toutes personnes et institutions en mesure de fournir ces informations.

Début de la médiation amiable4Art. XIX.25 et XIX.26

Avant que la médiation amiable puisse débuter, une convention doit obligatoirement être signée entre le médiateur et le débiteur. Cette convention contient entre autres :

  • La divulgation de tout conflit d’intérêt
  • L’étendue du mandat du médiateur amiable
  • L’objectif et les limites de la médiation amiable
  • Les droits et obligations du médiateur amiable et du débiteur
  • Les procédures à suivre pour le traitement des plaintes du débiteur à l’encontre de son médiateur de dettes amiable, les instances compétentes pour ce faire et les formes et délais à respecter
  • Les principes et règles applicables au traitement et à la transmission par le médiateur de données à caractère personnel
  • Les coûts éventuels de la procédure
  • La mention que certaines démarches effectuées par le médiateur de dettes amiable au cours de sa mission nécessitent obligatoirement l’accord préalable du débiteur

En signant cette convention, le débiteur est automatiquement réputé avoir valablement donné son accord préalable concernant les points suivants :

  • Le partage avec les créanciers de ses informations (strictement nécessaires à l’exercice de la mission du médiateur)
  • La prise de contact par tout moyen de communication avec toutes personnes et institutions aux fins de récolter les informations relatives aux dettes du débiteur
  • La sollicitation des créanciers afin de recevoir un décompte actualisé des créances, accompagné des pièces justificatives

En revanche, dans tous les autres cas où l’accord du débiteur est requis, la charge de la preuve de l’accord du débiteur incombe au médiateur de dettes amiable de telle sorte que l’accord exprès du débiteur devra à chaque fois être obtenu.

Le médiateur a l’obligation, lors des premiers entretiens, de vérifier que le débiteur est correctement informé du cadre et des limites de la médiation ainsi que des droits et obligations de chaque partie. Il doit en outre, après avoir évalué la pertinence d’entreprendre une médiation de dettes amiable, informer le débiteur quant à l’existence de solutions alternatives, les conditions de leur mise en œuvre ainsi que leurs implications concrètes sur ses droits et obligations.

Pendant la médiation amiable5Art. XIX. 27

Pendant toute la durée de sa mission, le médiateur accompagne le débiteur en fixant autant d’entretiens que nécessaire. Il est tenu de lui présenter toutes les possibilités et alternatives qui s’offrent à lui ainsi que leurs conséquences pour que le débiteur puisse prendre ses décisions en toute connaissance de cause.

Analyse de la situation du débiteur et inventaire des dettes6Art. XIX. 28 et 29

Le médiateur prend connaissance de la situation globale du débiteur et établit son budget. Ce budget doit permettre de lui garantir ainsi qu’à son conjoint ou cohabitant une vie conforme à la dignité humaine. Le débiteur doit être informé par le médiateur sur les droits sociaux auxquels il est éligible ou sur des démarches à entreprendre pour en bénéficier.

Un inventaire des dettes du débiteur doit être établi. Pour ce faire, le médiateur peut, avec l’accord préalable du débiteur, solliciter des créanciers un décompte actualisé de leurs créances accompagné de pièces justificatives. Il veille dans ses contacts avec les créanciers à préserver les droits du débiteur, et vérifie sur base des pièces et décomptes fournis la légalité des montants réclamés. S’il constate des motifs de contestation, le médiateur en informe le débiteur. Celui-ci peut demander l’assistance du médiateur afin de contacter les créanciers pour leur exposer les motifs de contestation. Lorsque le créancier n’accepte pas la contestation, le médiateur informe le débiteur des démarches amiables ou judiciaires qu’il peut encore entreprendre, sans toutefois jamais le représenter en justice.

Confidentialité et données à caractère personnel7Art. XIX.30

Tout au long de la médiation amiable, le médiateur est amené à traiter de nombreuses données à caractère personnel des différentes personnes concernées : débiteur, employés et représentants des créanciers, conjoint/cohabitant du débiteur. La loi précise les données pouvant être traitées dans le cadre des objectifs de la médiation. Ces données ne peuvent pas être conservées plus longtemps que la durée nécessaire au regard de la finalité pour lesquelles elles sont traitées, et ne peuvent (sauf disposition contraire de la loi) pas être conservées plus de dix ans à compter de la fin de la médiation amiable.

Négociations avec les créanciers8Art. XIX. 31 à 33

Quand il interagit avec des créanciers, le médiateur a l’obligation d’agir en concertation avec le débiteur et avec son accord. Il doit veiller à faire des propositions de remboursement réalistes après avoir attentivement examiné la situation du débiteur et avec son accord. Les créanciers peuvent accepter, refuser, ou encore faire des contre-propositions aux propositions de remboursement et d’accords qui leur sont soumis. Ils sont également libres de refuser de participer à la médiation de dettes amiable.

Exécution/suivi des accords9Art. XIX. 34 à 36

Sauf s’il demande l’assistance du médiateur amiable, il appartient en principe au débiteur d’exécuter lui-même les paiements au bénéfice des créanciers. Le médiateur a l’obligation de rencontrer régulièrement le débiteur pour suivre l’évolution de sa situation et l’exécution des accords. Lorsque sa situation budgétaire est modifiée, le médiateur doit proposer en concertation avec le débiteur et avec son accord une modification des modalités de remboursement. Le débiteur comme le créancier ont la possibilité de résilier l’accord unilatéralement à tout moment et sans motifs.

Echec des négociations et solutions alternatives10Art. XIX. 37 et 38

En cas d’échec des négociations ou lorsque le médiateur constate que la médiation amiable n’est pas/plus de nature à rétablir la situation financière du débiteur dans des conditions de vie conformes à la dignité humaine, il doit informer le débiteur des solutions alternatives qui s’offrent à lui ainsi que des conditions de leur mise en œuvre et leur impact sur ses droits et obligations. Le médiateur amiable n’est cependant pas soumis à une obligation de résultat quant à la réussite de la médiation de dettes amiable.

Obligations du débiteur11Art. XIX. 39

Tout au long de la procédure, le débiteur a l’obligation de collaborer de manière loyale et entière avec son médiateur, et doit notamment :

  • Effectuer les démarches administratives convenues avec le médiateur
  • Fournir au médiateur tous les renseignements et documents nécessaire pour apprécier sa situation globale
  • Prévenir immédiatement le médiateur en cas de changement dans sa situation pouvant avoir une influence sur l’exécution des accords de remboursement ou sur la poursuite de la médiation
  • Ne pas prendre d’initiative envers ses créanciers sans se concerter au préalable avec le médiateur

Fin de la médiation amiable12Art. XIX. 40 à 42

Le débiteur peut mettre fin à la médiation amiable à tout moment sans devoir se justifier.

Le médiateur quant à lui ne peut mettre fin à la médiation que dans les cas suivants :

  • Le débiteur ne respecte pas ses obligations malgré l’envoi d’un premier avertissement (préavis = 1 mois minimum)
  • Le médiateur ne remplit plus les conditions d’indépendances requises (préavis = 1 mois minimum)
  • La médiation ne peut plus se poursuivre dans des conditions satisfaisantes (préavis = 2 mois minimum)
  • Le débiteur a déménagé et l’institution publique ou privée agréée pour pratiquer la médiation de dettes amiable n’est dès lors plus territorialement compétente

Le médiateur avertit les créanciers que sa mission a pris fin au plus tard avant la fin de sa mission.

Coûts de la médiation amiable13Art. XIX. 43 et 44

Les institutions privées ou publiques agréées ne peuvent réclamer que les frais qui sont fixés par l’autorité régionale compétente qui fixe leurs conditions d’agrément. Les avocats, officiers ministériels ou mandataires de justice dans l’exercice de leur profession ou de leur fonction peuvent quant à eux fixer librement leurs frais et honoraires. Ces derniers doivent clairement informer le débiteur de leurs tarifs avant la signature de la convention, ainsi que des alternatives peu onéreuses voire gratuites qui existent.